Danser : essai de définition
pour dire l'art de la danse d'origine africaine
Rythme et Souffle
Puisque la musique et la danse sont rythmiques et que le rythme module la vie, il n'y a pas de danse s'il n'y a pas de souffle. Le souffle est le point de repère sin qua non de l'être quant à sa vitalité.
La résultante est en danse africaine, une meilleure fluidité du mouvement plus en harmonie avec le corps dans des trajectoires intarissablement complexes en force, vigueur ou légèreté et même en rigidité, mais toujours dynamique car supporté par le souffle.
C'est par la reconnaissance de la capacité autorégulatrice du souffle qu'on peut l'utiliser adéquatement et le laisser agir afin d'assurer l'harmonie de la coordination physique et mentale de notre être. Autrement, nous tendons vers un état de déséquilibre.
LWASA - Compagnie Danse Nyata Nyata |
Le souffle, selon Zab Maboungou de la Compagnie Danse Nyata Nyata, de sa source et par son parcours à travers et hors du corps, est synonyme d'élément de base du rythme dans le contexte des techniques de la danse africaine. Le souffle, capteur de rythme...sort, revient : le souffle génère le souffle...Le corps, centre de direction du souffle...(1), lui sert de coffret avec lequel il forme un rapport de symbiose ouverte et nourrissante.
Symbiose ouverte parce que non comprimée mais expansionniste; le souffle est projeté, déposé, concentré, et redistribué, il circule et est à la fois réceptacle immobile.
Symbiose nourrissante parce qu'étant partie intégrante du métabolisme naturel du corps et s'activant spontanément, le souffle est source de vitalité. L'image du coffret s'articule en terme de résonance, d'écho et ici d'un dynamisme continu dans des limites à la fois physiques, précises et immatérielles.
La compréhension de ce rapport du contenant avec son contenu qui n'est jamais statique permet d'appréhender toute cette dynamique continue et réaliser comment la rythmique respiratoire intervient dans la dynamique du corps, dans ses liens avec lui-même mais également avec ce qui est au-delà de lui.
D’où le constat qu'en canalisant le souffle en danse africaine, c'est à proprement parler la capacité vitale de notre être que nous mettons à l’œuvre lorsque nous dansons (1). Et nous dansons pour communiquer, pour célébrer, pour dire...
La vie et l'univers
La conception africaine de la vie et de l'univers est holistique. Par conséquent, la spiritualité est au centre de tout et tout est au centre de la spiritualité. C'est un mouvement intégral qui inclus évidemment la danse.
La spiritualité africaine peut être schématisée en un triangle. La pointe supérieure représente Dieu, la représentation de toutes les forces. Les deux côtés du triangle, représentent les dieux et les ancêtres. La base, représente les forces associées à la magie et la médecine. Les hommes sont au milieu et doivent vivre en harmonie avec toutes les forces qui affectent leur vie, leur famille et leur travail.
Les forces s'étendent au règne animal et doivent êtres appréhendées et asssumées autant que possible.
Même la nature inorganique n'est pas morte et peut être véhicule de pouvoirs. La conception de l'existence et de la vie est une nécessaire dualité équilibrante, la nuit et le jour, la vie et la mort, la parole qui naît, vit et meurt et reprend vie à chaque instant au gré de celui qui parle et qui se tait.
Le rythme Candombe: 3 ''Tambores'' |
Candombe, un exemple frappant de la résilience de la culture africaine par le rythme et la danse |
Dans toute l'Amérique et les Antilles, les résonances du tambour ou leurs souvenirs font battre les coeurs des descendants d'esclaves de souche africaine et la force du rythme maintient leurs pulsions et leur énergie vitale. L'art de la danse tel qu'il leur a été légué constitue une puissante Force quant à la conscience de leur appartenance à cet univers en tant qu'êtres animés du souffle de Dieu malgré tout...
Tradition vs culture, ethnicité, race et identité...
La tradition s'installe là où il y a un contexte, là où la danse est plus qu'un jeu de mouvement ou de l'art pour la forme. Les différentes formes de danses sont tout autant de variations d'un même type de langage, d'une même langue qu'on résumerait comme des expressions différentes ayant des significations plus ou moins différentes.
Rythme Zarengne, tradition Vodou d'Haiti, Gwoup Kiskeya |
Je parle peu, mon langage par l'expression orale me semblant peu compréhensible pour le commun des gens, mais je m'exprime aisément à travers la danse. La danse semble susciter plus de réceptivité.
De là, je résume mon sentiment intime face à la danse comme le bonheur d'exploiter toute l'énergie créatrice en nous ainsi que la force, l'agilité et la sensualité de notre corps de même que l'éveil de nos sens quant au rapport de notre corps avec les éléments. C'est l'harmonie du corps avec les émotions; l'essence même des danses africaines et antillaises.
La motricité corporelle est une exploitation du corps avant tout à partir des vibrations intérieures qui se rythment aux vibrations des percussions. Le corps travaille de façon soutenue, en développant la flexibilité, la force et l'endurance. Les pulsions créatrices se développent à partir de la capacité à intégrer intérieurement les rythmiques particulières.
GWOUP KISKEYA (1985-1996) Création de la synergie d'Empowerment, solidarité et cohésion par les racines culturelles à travers la danse |
Chaque danse est un langage. Il faut le contexte pour pouvoir s'approprier une danse, un vocabulaire particulier, pour pouvoir communiquer avec ce langage. La danse est un élément important de l'identité culturelle ou ethnique. Elle évolue avec l'évolution du concept de la culture et de l'ethnicité, des mouvements qui en découlent et de la réalité des changements locaux ou globaux dans le temps, tant ethniques, culturels, économiques que politiques.
Le corps étant le véhicule de la danse ou son cheval, par analogie avec le terme usuel du vaudou haitien, on pourrait croire qu'il peut tout autant être identifié culturellement ou par ethnicité. Le fait est que le corps étant matériel évoluera selon l'environnement physique qui le conditionne majoré de l'apport conscient d'un entraînement objectif.
L'entraînement objectif et les conditions de l'environnement donneront sa spécificité au corps. Cette spécificité dépasse la notion de race bien souvent associée à l'identité. L'identité n'est pas contenu dans le corps, pas plus que la culture et l'ethnicité. De même, l'identité est plus que culturelle ou ethnique, bien qu'on en sabote souvent la portée pour la réduire à une idéologie de race et du coup à associer également la culture et l'ethnicité à cette notion construite de toute pièce, étroite, bornée et ségrégationniste de race.
Les danses traditionnelles pour se prévaloir de ce vocable doivent maintenir leur signifiant, quitte à se réinsérer dans un contexte qui leur est propre. Les danses traditionnelles africaines reflètent les caractéristiques, les valeurs, la vision des sociétés qui composent la diaspora d'origine africaine dans ses rapports avec l'être, les êtres, les éléments, l'environnement et l'univers.
Ces sociétés sont formées d'une multitudes de communautés qui se distinguent par ethnies. Les ethnies en particulier qui ont été décimées en Haiti sont les Sénégalais, les Wolof, les Foulbé, les Bambara, les Quiamba, les Arad, les Mines, les Caplaou, les Fon, les Mahi, les Nago, les Mayombé, les Mondongue, les Angolais et certains autres. L.V. Thomas et R. Luneau dans leur ouvrage, Les Sages dépossédés, répertorient 140 ethnies à travers l'Afrique Noire.
En général, les formations en danse ne permettent pas d'appréhender ce qu'est le langage des danses africaines ou si peu que cela est tout comme. Avec les cours de danse, on en est qu'à l'alphabet.
En dehors du contexte initial, la formation en danses africaines ou d'origine africaine, en plus de la technique appropriée, doit inclure dans un souci d'intégrité, l'enseignement de la signification de ces danses, leur objectif, leur contexte ainsi qu'une connaissance des aspects sociaux économiques, politiques, géographiques et historiques de la communauté d'oú ces danses sont issues. Tout cela sans omettre son rôle médiateur d'une infinité de sens.
Seul ce souci d'intégralité dans l'enseignement d'une danse particulière permettra à l'initié, à défaut de vivre le contexte, de comprendre ce que la danse véhicule et de s'approprier les éléments qui la caractérisent.
Autrement, il ne s'agira que d'une transmission de techniques dépourvues de sens, qui formera le corps certes, mais sera en deçà de toute la portée holistique des danses d'origine africaine. D'autre part, si en plus de la technique, seul une signification partielle de la danse est enseignée et toujours hors contexte, on se maintient au niveau de folklore.
Je vous encourage à prendre un instant pour me transmettre vos observations ou tout commentaire sur Laissez-moi danser - Partie 2
(1) Extraits du livre Heya Danse ! Poétique, historique et didactique de la danse africaine de Zab Maboungou
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Je suis Turenne / Tilarenn. Je te reçois avec grand plaisir dans ce fervent parcours par la danse, chemin du mieux-être universel qu'est le mouvement, en inspirations à vibrer de toute notre énergie vitale et danser ton âme.
Danse, fais vibrer ton énergie vitale et habite chaque instant ! |
A propos de l'auteur : Moi
A propos de moi : Turenne ° Portrait
VUE : Dans chaque texte, saisissez l'énergie vitale et créatrice dont nous vibrons par essence, pour votre réjouissance
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